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Chroniques sur le monde contemporain : G. Eturo, G. Bloufiche et Major Tom

Après les européennes : cette alliance improbable qui sauverait la France (et l'Europe !)

Publié le 25 Mai 2014 par G. Eturo in Politique

 

L'Europe à l'aube de sa dernière chance, voilà le titre que Nicolas Brunel et moi donnions à notre essai écrit en 2013. Les résultats des élections européennes de ce dimanche, qui voient le FN arriver largement en tête, montrent que nous avions raison de tirer ce signal d'alarme. En substance, nous disions que l'Union européenne était indéfendable, qu'elle n'avait abouti qu'à installer un fédéralisme technocratique et coercitif au service d'un projet de société oligarchique. Nous disions que l'Union allait mourir ne ne pas avoir su devenir une démocratie et ne pas avoir voulu être européenne, c'est à dire ancrée sur un territoire et désireuse de forger une nouvelle souveraineté continentale. Aujourd'hui, le constat est sans appel : les Français, autant par l'abstention de masse que par la place de leader qu'ils ont accordée au Front National, exigent la fin du processus d'intégration tel que nous l'avons connu, ainsi que de salutaires remises en cause de ce qui constitue l'acquis communautaire.

 

Ceci étant, l'impasse politique dans laquelle se trouve notre pays se trouve amplifiée par les résultats de ces élections. Les partis du front républicain contineront de défendre l'Europe via l'Union - quelle que soit l'approche critique qui puisse être la leur - tandis que le Front National réclamera plus fortement encore une sécession française tout en disposant d'ailleurs de plus de 20 députés au Parlement de Strasbourg. Autant dire que de cette élection, il ne sortira rien de bon pour la France. J'ai donc aujourd'hui, plus encore qu'hier, la conviction que la question européenne doit faire l'objet d'un référendum dans les plus brefs délais, ainsi que nous le proposions dans notre ouvrage. Nous avions même écrit au Président de la République en 2013, lui faisant état de l'urgence d'une telle initiative, lettre qui, comme on pouvait s'y attendre, n'a donné lieu qu'à une réponse convenue et même à certains égards, pitoyable.

 

Combien de temps encore, notre pays devra-t-il s'enfermer dans l'opposition stérile de républicains conduisant une politique néopétainiste, c'est à dire une triple politique de renoncement, d'alignement et de soumission, et d'un Front National dont les récents accents gaullistes ne sauraient faire oublier ses racines historiques et intellectuelles tout autant que ses profondes ambiguïtés idéologiques ? Notre grande nation ne pourra s'en sortir, comme toujours, que si elle se rassemble. Et pour parvenir à cette noble fin, précisément, il faut régler la question européenne comme le Général De Gaulle régla politiquement la question algérienne : au moyen du référendum.


L'Union Européenne n'étant pas réformable à l'aune de la mécanique des traités et compte tenu du trop grand nombre d'Etats membres (28), seul un séisme politique majeur provenant de l'expression de la souveraineté populaire serait en mesure de brusquer sérieusement le cours des choses pour le réorienter, étant entendu que la France n'est pas un petit pays sur le vieux continent mais la seconde puissance, et qu'une Europe limitée à l'Allemagne et quelques Etats satellites n'aurait pas grand sens. Ce référendum devra amener le peuple français à trancher quant au projet européen qu'il souhaite : soit un projet fédéral aboutissant à une démocratie européenne continentale, soit un projet confédéral mettant fin au processus "d'union sans cesse plus étroite" pour établir une Europe des coopérations, c''est à dire une Europe des nations telle que l'envisageait le Général De Gaulle.

 

L'avantage de cette démarche réside en ceci que, quelle que soit l'option privilégiée par les Français, la réorientation profonde du cours des choses serait assurée, soit que certains acquis de l'Union en viennent à être réellement remis en cause (puisqu'aujourd'hui nous n'avons que des promesses et des discours le temps des campagnes électorales), avec la renationalisation subséquente de compétences telles que la monnaie ou le budget national, soit que le gouvernement de la France entame des négociations (fructueuses ou non, au demeurant) pour établir une Constitution européenne autour d'un noyau d'Etats qui, de fait, quitteraient l'Union européenne pour en intégrer une nouvelle, démocratique, fédérale et souveraine (ce que nous avons appelé dans le livre, L'Union Fédérale des Etats-Nations d'Europe, l'UFENE).


L'organisation de cette consultation populaire précédé d'un large débat doit permettre de rebattre les cartes et de redessiner les clivages. Je perçois d'ores et déjà trois positions politiques probables : ceux qui la refuseront au nom de l'Europe, pour ne pas destabiliser l'Union européenne (ce qu'ils n'aiment rien tant) ; ceux qui souhaiteront l'option fédérale ; ceux, enfin, qui défendront le retour à la case nation. Je suis pour ma part, comme tous ceux qui ont pu me lire ici le savent, plutôt favorable à une fédération européenne démocratique et souveraine. Mais je considère également que le retour à la maîtrise des fondamentaux de la souveraineté nationale est nettement préférable à la poursuite du processus d'intégration sous les auspices de l'Union européenne, puisque cette dernière ne fait que NEUTRALISER la souveraineté tout en travaillant, du fait des contours actuels de l'Union Economique et Monétaire (UEM), à l'installation d'une nouvelle hégémonie économique allemande.

 

J'assume cette conception dont je revendique la cohérence parce qu'entre l'indépendance nationale et l'Europe européenne (fédérale), il y a un substrat idéologique commun qui est l'attachement à l'autonomie du politique et donc à la démocratie. Je doute que les eurobéats qui peuplent nos partis lachent facilement prise, malgré les douches froides accumulées scrutin après scrutin. J'ai plutôt la conviction qu'ils seront nombreux à défendre encore l'Union européenne en prétendant la réformer, ce qui nous conduira dans le mur car ils n'y arriveront pas ou en tous cas pas à temps (et qu'on ne nous ressorte pas, pour cela, la bonne blague des coopérations renforcées).


C'est pourquoi j'appelle de mes voeux une alliance politique tactique inédite entre les souverainistes et les fédéralistes dans notre pays, et pourquoi pas à une plus large échelle. Dans l'ordre de la pensée économique, il me semble que cette alliance a déjà été faite par les économistes atterrés, partagés en leur sein entre le retour à la souveraineté nationale et l'accomplissement d'une véritable fédération européenne (cf. leur dernier ouvrage Changer l'Europe !). Parce que nous avons le mérite de ne pas faire partie du cercle des néopétainistes, ou, pour le dire autrement, de ces Européens qui, en fait d'Europe, chérissent l'hypercapitalisme, le modèle de société américain et l'OTAN, parce que nous sommes les défenseurs de la démocratie politique qui ne peut se concevoir sans la maîtrise et l'exercice pratique des instruments de souveraineté, nous devons coordonner nos moyens et conjuguer nos énergies pour obliger le gouvernement à organiser le referendum que Nicolas Brunel et moi appelions de nos voeux. C'est dans le cours de la campagne que nous nous combattrons alors, dans un esprit de respect mutuel et dans l'acceptation résolue du choix qui sera fait par les Français. Et croyez-moi, cela s'avèrera sans doute plus efficace et plus salutaire que n'importe quel "front républicain" dont on voit bien qu'il ne sert que de marche-pied à l' (inéluctable ?) ascension au pouvoir du FN. Il n'est pas trop tard pour faire bouger les lignes et contraindre le Président de la République à renoncer à l'immobilisme coupable qui est le sien, et qui le met de fait chaque jour au service du déclin national. Il en va du salut de la France, il en va de l'avenir de l'Europe et de ses enfants.

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G
Très intéressant. Merci.
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